Mixité

Féminisation du management

Publié le 16 août 2023

Tribunes de Paola Guesnet, responsable du service data competence center de SPIE Deutschland & Zentraleuropa et pilote du réseau So’SPIE Ladies en Allemagne et Isabella Lenarduzzi, fondatrice de JUMP, entreprise sociale d'accompagnement à l'égalité professionnelle.

En Allemagne, les mères qui choisissent de travailler doivent surmonter des obstacles à la fois pratiques ( comme des systèmes de garde d’enfants inadaptés ) et culturels : elles sont aujourd’hui encore souvent mal considérées, tant dans la sphère privée que dans les entreprises, où des préjugés tenaces les empêchent d’accéder à certains postes. Et ceci est valable pour toutes les femmes. Peu importe qu’elles aient des enfants ou non. SPIE n’est bien sûr pas responsable de ces préjugés, présents dans toute la société, mais nous ne sommes pas non plus en dehors de la société.

Nous avons le devoir d’agir pour faire évoluer nos pratiques et notre culture.”
Paola GUESNET, Responsable du service data competence center de SPIE Deutschland & Zentraleuropa et pilote du réseau So’SPIE Ladies en Allemagne

C’est le sens du réseau So’SPIE Ladies
 

Lancé en 2015 dans tous les pays où le Groupe est présent, il a pour vocation de favoriser la diversité de genre à travers des actions concrètes portant sur le sponsoring, l’attractivité, le recrutement, ainsi que sur la fidélisation et la formation des collaboratrices. En Allemagne, nous avons commencé par développer une palette d’initiatives en interne pour nous faire connaître et disposer d’une base solide.

Cela inclut des formations aux biais inconscients, un programme de mentoring qui nous a permis de soutenir 13 femmes en 2021, ou encore, pour l’ensemble des collaborateurs, une lettre de la diversité et des réunions d’échanges tous les deux mois. Nous organisons également le « lunchroulette », un outil original qui permet aux collaboratrices d’étoffer leur réseau professionnel.

Les retours des collaborateurs qui participent aux actions sont très positifs : cela leur permet de s’entraider, de partager, de trouver de nouvelles idées… et souvent, grâce à tout cela, de mieux travailler. Aujourd’hui, une de nos priorités est d’impliquer davantage les hommes : ils sont en effet très largement majoritaires dans l’entreprise et s’ils ne se mobilisent pas, rien ne changera. Nous voulons aussi être plus visibles en externe, en participant par exemple à des salons de recrutement. C’est indispensable pour atteindre notre objectif d’augmenter de 5 % les recrutements de femmes, un objectif qui est décliné dans toutes les divisions pour que tout le monde se sente concerné.

C’est d’abord aux hommes d’agir pour l’égalité de genre en entreprise, car c’est beaucoup plus facile pour eux de porter ces combats.”
Isabella LENARDUZZI, fondatrice de JUMP, entreprise sociale d’accompagnement à l’égalité professionnelle

En Europe, le niveau d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes est aujourd’hui extrêmement contrasté. La Norvège ou la France sont par exemple championnes dans ce domaine : 44 % des membres des conseils d’administration des grandes entreprises françaises sont ainsi des femmes. À l’inverse, j’observe un très fort recul sur ces sujets dans de nombreux pays.

Dans ce contexte, comment agir quand on est, comme SPIE, une entreprise où les métiers restent très majoritairement exercés par des hommes ?

La toute première chose à faire, c’est de prendre conscience qu’il existe des inégalités systémiques entre les hommes et les femmes : des assignations sociales nous conditionnent en effet très tôt dans notre vie à adopter certains comportements en fonction de notre genre, cela reste une réalité. Les entreprises doivent la prendre en compte en faisant évoluer leur propre culture pour qu’elle soit inclusive des femmes autant qu’elle l’est pour les hommes et pour permettre ainsi à tous les membres du personnel de pouvoir donner le meilleur d’eux-mêmes. Cela passe tout d’abord par des actions positives qui tendent à compenser ces inégalités systémiques, afin de viser une réelle équité. Un exemple : si j’ouvre un poste de manager, je ne vais pas juste croiser les doigts en espérant que des femmes postulent, car elles n’ont souvent pas été « conditionnées » pour se mettre en avant ou croire qu’elles ont les compétences. Pour rééquilibrer, je vais donc proactivement motiver certaines femmes en les rassurant sur leur adéquation au poste.

Autre point important : les comités de direction et tous les managers des entreprises devraient être formés au management inclusif. Et toutes les équipes composées essentiellement d’hommes qui accueillent une femme devraient bénéficier d’un accompagnement. C’est essentiel, car changer des comportements intégrés depuis longtemps, cela s’apprend. Et c’est ce qui donnera envie à de nouvelles recrues de venir, et de rester quand elles verront que les actes sont alignés avec les valeurs affichées.

On sent une réelle volonté de faire bouger les lignes sur ces questions chez SPIE. Je pense aux engagements du Groupe sur la féminisation du top management : c’est formidable, car cela dit à toutes les femmes, en interne et en externe, qu’il est possible de faire carrière chez SPIE ! Mais attention, il ne faut surtout pas faire peser sur ces femmes la responsabilité des combats pour l’égalité : c’est aussi aux hommes de s’en charger. C’est plus efficace en raison de leur place dans l’entreprise, et c’est aussi plus facile pour eux et plus valorisé car on considère qu’ils le font pour des valeurs justes et altruistes alors que les femmes portent toujours la suspicion de s’occuper d’égalité professionnelle pour leur propre avancement ou par « féminisme radical ».